Écrit par : Samael Aun Weor Catégorie : Les Trois Montagnes
Pour certaines personnes excessivement superficielles, la théorie de la réincarnation est un sujet de moquerie ; pour d’autres très religieuses, elle peut signifier un tabou ou un péché ; pour les pseudo-occultistes, c’est une croyance très solide ; pour les fripons de l’intellect, c’est une utopie insensée ; mais pour les hommes qui se souviennent de leurs existences passées, la réincarnation est un fait.
Au nom de la vérité, je dois affirmer solennellement que je suis né en me rappelant toutes mes réincarnations passées et jurer ceci n’est pas un délit. Je suis un homme à la Conscience éveillée.
Il est clair que nous devons faire une nette différence entre Réincarnation et Retour (deux lois très distinctes), mais ceci n’est pas le sujet du présent chapitre. Après le préambule, allons au fait, droit au but.
Autrefois, quand les mers étaient infestées de vaisseaux pirates, je dus passer par une terrible amertume.
Alors, le Bodhisattva de l’ange Diabulo Cartobu était réincarné.
Il n’est pas inutile d’affirmer avec une certaine insistance que cet être possédait un corps féminin d’une splendide beauté. Il est évident que j’étais son père.
Malheureusement et à une heure infortunée, la cruelle piraterie qui ne respectait ni la vie ni l’honneur, après avoir dévasté le village européen où beaucoup de citoyens vivaient en paix, séquestra les belles jeunes filles de l’endroit, dont ma fille faisait évidemment partie, innocente donzelle des temps passés.
Malgré la terreur de tant de rustres, je parvins vaillamment, au péril de ma propre vie, à affronter le fourbe capitaine du vaisseau pirate.
Sortez ma fille de cet enfer où vous l’avez mise, et je vous promets que je sortirai votre âme de l’enfer où elle est déjà plongée ! Telles furent mes douloureuses exclamations.
Le terrible corsaire, en me regardant fièrement, s’apitoya sur mon insignifiante personne et, d’une voix impérieuse, m’ordonna d’attendre un moment.
Je vis avec une angoisse infinie le flibustier allant vers son bateau noir ; je comprends que je sus astucieusement tromper ces impitoyables loups des mers ; ce qui est sûr, c’est que, quelques instants après, il me rendit ma fille.
Par Dieu et Sainte-Marie ! Qui aurait pensé qu’après tant de siècles, j’allais rencontrer de nouveau l’Ego de ce terrible corsaire, réincorporé dans un nouvel organisme humain.
Ainsi est la Loi de l’Éternel retour de tous les êtres et de toutes les choses ; et tout se répète en accord avec une autre loi appelée Récurrence.
Une nuit de grandes inquiétudes spirituelles, je le trouvais joyeux dans un groupe d’aspirants rosicruciens.
Ce vieux corsaire parlait également la langue anglaise, car il avait été marin dans une entreprise maritime nord-américaine.
Cette amitié fut cependant un feu follet, un feu de paille, car je pus vérifier très vite que cet homme, malgré ses ardents désirs mystiques, continuait dans son fond intérieur le plus intime à être l’ancien corsaire vêtu d’habits modernes.
Cet homme en question me racontait avec grand enthousiasme ses expériences astrales, car il est incontestable qu’il savait se dédoubler à volonté.
Un certain jour parmi tant d’autres, nous convînmes d’un rendez-vous métaphysique transcendant dans le S.S.S. de Berlin, en Allemagne.
Ce fut pour moi une expérience relativement nouvelle, car jusqu’alors, il ne m’était pas encore arrivé de réaliser l’expérience de projection volontaire, de l’Eidolon, mais je savais que je pouvais le faire ; et c’est pourquoi j’osais accepter ce rendez-vous.
Je me souviens avec une totale clarté de ces moments solennels où je me transformais en espion de mon propre sommeil.
J’attendais en affût mystique l’instant de transition entre veille et sommeil ; je voulais profiter de ce moment merveilleux pour m’échapper de mon corps physique.
L’état de lassitude et les premières images ensommeillées furent suffisants pour comprendre parfaitement que le moment ardemment désiré était arrivé.
Je me levais du lit délicatement et, en marchant très calmement, je sortis de la chambre, possédé par une certaine volupté spirituelle exquise, délicieuse.
Il est incontestable qu’en me levant du lit au moment où j’allais m’endormir, le dédoublement astral, la séparation très naturelle de l’Eidolon, se produisit.
Avec l’éclat très particulier du corps astral, je m’éloignais des alentours, avec le désir d’arriver au Temple de Berlin.
Évidemment, je fis un délicieux voyage sur les eaux agitées de l’océan Atlantique.
En flottant sereinement dans la rayonnante atmosphère astrale de ce monde, j’atteignis les terres de la vieille Europe et je me dirigeais immédiatement vers la capitale de la France.
Je marchais silencieusement comme un fantôme dans toutes ces vieilles rues qui avaient autrefois servi de scène à la Révolution française.
Soudain, quelque chose d’insolite se produisit ; une onde télépathique avait atteint mon plexus solaire et je ressentis l’ordre impératif d’entrer dans une précieuse demeure.
Jamais en aucune façon, je ne regretterai d’avoir traversé le seuil d’une si noble demeure, car j’y trouvais un ami de mes incarnations passées.
L’ami en question flottait, plongé dans l’ambiance fluidique astrale, en dehors de son corps dense qui gisait endormi dans son lit parfumé d’acajou.
Le corps physique de sa ravissante bien-aimée dormait également dans le lit nuptial ; l’âme sidérale de cette dernière, loin de son réceptacle mortel, partageait la joie mirifique de son époux et flottait.
Et je vis deux tendres enfants d’une grande beauté, jouant avec bonheur dans le charme magique de cette demeure.
Je saluais mon ancien ami et son Ève ineffable, mais les enfants furent effrayés par ma présence inhabituelle.
Il me sembla préférable de sortir dans les rues de Paris et mon ami ne repoussa pas cette idée, tout en bavardant, nous nous éloignâmes ensemble de la maison des délices.
Nous cheminâmes tout doucement, tout doucement, dans toutes ces rues et avenues qui partent du centre vers la périphérie.
Aux alentours de cette grande ville, je lui proposais, à bâtons rompus, comme l’on dit par ici, de rendre visite ensemble au Temple ésotérique de Berlin ; l’Initié déclina très aimablement l’invitation en objectant qu’il avait une femme et des enfants et qu’il voulait concentrer son attention sur les problèmes économiques de la vie uniquement.
À grand regret, je m’éloignais de cet homme éveillé, et je me lamentais de le voir faire passer au second plan son travail ésotérique.
En me suspendant à la lumière astrale des merveilles et prodiges, je passais par-dessus de très anciennes et vétustes murailles.
Heureux voyage, tout au long du chemin tortueux qui, en serpentant, se déroulait ici, là et là-bas.
Enivré d’extase, j’arrivais au Temple aux murs transparents, l’entrée du Lieu saint était certainement très singulière.
Je vis une sorte de parc dominical tout plein de plantes superbes et de fleurs exquises qui exhalaient un souffle de mort.
Dans le fond extraordinaire de ce jardin enchanteur resplendissait le Temple solennel des splendeurs.
Les portes en grilles de fer qui donnaient accès au précieux parc du Sanctuaire s’ouvraient parfois pour laisser entrer quelqu’un et parfois se fermaient.
Tout cet ensemble précieux et merveilleux se trouvait illuminé par la lumière immaculée de l’Esprit universel de vie.
Devant le Sancta Sanctorum je trouvais, heureux, beaucoup de nobles aspirants de nationalités, peuples et langues divers.
Des âmes mystiques qui, pendant les heures où le corps physique est endormi, mues par la force du désir, s’étaient échappées de la forme dense et mortelle pour venir jusqu’au Sancta.
Tous ces dévots sublimes parlaient de sujets ineffables ; ils parlaient de la Loi du Karma, discouraient sur des évènements cosmiques extraordinaires. Il émanait d’eux-mêmes le parfum de l’amitié et l’arôme de la sincérité.
Dans cet état de bien-être, je marchais ici et là, à la recherche de l’audacieux flibustier qui m’avait donné ce tragique rendez-vous.
Je fis irruption dans de nombreux groupes en demandant le personnage en question, mais personne ne put me donner la moindre réponse.
Je compris alors que cet ancien pirate n’avait pas accompli la parole engagée. J’en ignorais les motifs et me sentis frustré.
Je résolus de m’approcher en silence de la glorieuse porte du Temple de la Sagesse ; je voulus pénétrer à l’intérieur du Lieu saint, mais le Gardien me ferma la porte en disant : « Ce n’est pas encore l’heure, va-t’en ! ».
Serein et compréhensif, je m’assis joyeusement sur la pierre symbolique, très proche du portail du mystère.
En ces moments de plénitude, je m’auto-observais en totalité ; je ne suis certainement pas un sujet au psychisme subjectif ; je suis né avec la Conscience éveillée et j’ai accès à la Connaissance objective.
Comme le corps astral me semblait beau ! (Résultat de très anciennes et splendides transmutations de la libido).
Je me souvins de mon corps physique qui dormait en ce moment tout au loin dans un village d’Amérique.
Tout en m’auto-observant, je commis l’erreur de confronter les véhicules astral et physique ; le résultat d’une telle comparaison fut que l’extase disparut et que je retournais instantanément à l’intérieur de ma dense enveloppe matérielle.
Quelques instants après, je me levais du lit ; j’avais réussi un merveilleux dédoublement astral.
Quand je demandais sévèrement au vieux flibustier pour quelle raison il n’avait pas été capable de respecter sa parole, il ne put pas me donner de réponse satisfaisante.
Trente-cinq années s’étaient écoulées depuis l’époque où le vieux loup de mer et moi avions convenu d’un si mystérieux rendez-vous.
Au-delà du temps et de la distance, cet étrange personnage n’était plus qu’un souvenir écrit dans les pages poussiéreuses de mes vieilles chroniques.
Mais je confesse sans ambages qu’après tant d’années, il m’arriva d’être surpris par quelque chose d’insolite.
Une nuit de printemps, alors que je me trouvais absent de la dense forme périssable je vis le Seigneur Shiva (l’Esprit-Saint), ma Monade sacrée surindividuelle, avec l’aspect ineffable de l’Ancien des Jours.
Le Seigneur admonestait avec une grande sévérité le vieux corsaire des mers ; il est incontestable que le corps physique de ce dernier, à cette heure de la nuit, était en train de dormir dans son lit.
Je voulus impatiemment intervenir comme le troisième larron. Le Vieux des Siècles m’ordonna de façon catégorique le calme et le silence.
Autrefois, ce pirate m’avait rendu ma fille en la tirant de l’enfer où lui-même l’avait plongée.
Maintenant, mon Être Réel, Samaël, se démenait pour le libérer, l’affranchir, pour le sortir des mondes infernaux.
Ce chapitre est tiré de Les Trois Montagnes (1972) par Samael Aun Weor.